- BLOIS (CHÂTEAU DE)
- BLOIS (CHÂTEAU DE)BLOIS CHÂTEAU DELa ville et le château de Blois ont retenu l’attention de Balzac et de Victor Hugo, qui en ont donné des descriptions enthousiastes et précises. De tout temps, le promontoire, situé entre la Loire et l’Arrou, sur lequel s’élève le château, fut utilisé pour la défense. Sous les comtes de Blois, au XIIIe et au XIVe siècle, le château était devenu une redoutable demeure fortifiée que Froissart considérait comme une des plus belles du royaume. De la demeure seigneuriale, on conserve la grande salle, celle où Henri III devait à deux reprises réunir les états généraux. Mais ce sont les constructions de la Renaissance qui ont fait la renommée de Blois. Dès la mort de Charles VIII, on abandonne Amboise, que le roi aimait tant. Et, le domaine du dernier comte de Blois étant passé à la couronne de France, l’année même de son avènement, le nouveau roi, Louis XII, entreprend de rebâtir l’aile qui sépare la cour principale de l’avant-cour. En 1502, les travaux sont déjà très avancés. François de Pontbriant assume la direction générale de l’entreprise. On retrouve également à Blois deux des principaux maçons d’Amboise: Colin Biard et Jacques Sourdeau. Le bâtiment, sans symétrie, ni dans le plan ni dans la disposition des façades, reste dans la tradition gothique du XVe siècle. Il est réalisé dans un esprit pittoresque et mouvementé, et combine harmonieusement la pierre, la brique et l’ardoise. Le portail est incontestablement le morceau capital de la façade avec son riche dais à décor flamboyant abritant la statue équestre du roi. Sur la cour, la galerie à arcades en anse de panier, rythmée par de frêles piliers très ornés, constitue un parti que l’on retrouve dans les châteaux des environs. L’armature du décor demeure ce qu’elle était à Amboise. Les lucarnes profilent sur la toiture l’architecture flamboyante de leurs gables à crochets, de leurs pinacles et de leurs fleurons. Le porc-épic de la maison d’Orléans est présent partout. Toutefois, cet ensemble médiéval est très souvent agrémenté de motifs d’inspiration étrangère: ensemble unique, d’une infinie séduction, véritable alliance de deux styles.Dès 1515, au début de son règne, François Ier décide de compléter le château. La direction des travaux est assurée par Raymond Phélypeaux assisté de Jacques Sourdeau. La façade sur la cour, élevée la première, tout en pierre de taille, éclate de blancheur et attire les regards par la volonté qu’elle affiche de rompre bruyamment avec ce qui l’entoure. C’est une grande façade plate à trois étages ornée de pilastres et couronnée d’une large corniche richement sculptée. Toutefois, la structure même de l’édifice reste encore très fortement imprégnée de traditions médiévales: fenêtres à meneaux, lucarnes se détachant sur le haut toit garni de souches de cheminée, et surtout percements irréguliers encadrant de larges surfaces murales décorées de salamandres. Le décor exprime les progrès réalisés dans l’ornement depuis les constructions antérieures: l’ordonnance de pilastres, qui allait avoir tant de vogue sous le règne de François Ier, est systématiquement employée en façade. Le décor, d’une inépuisable fantaisie, est aussi d’une grande délicatesse d’exécution; la mouluration, les chapiteaux d’une grâce et d’une variété infinies, les arabesques encadrant les fenêtres, les motifs de la corniche sont empruntés au répertoire ornemental importé d’Italie. Si le fastueux escalier à claire-voie, qui occupe le centre de cette façade, reste de conception gothique, sa modénature est complètement renouvelée. À Blois, pour le première fois dans l’histoire de la Renaissance française, l’italianisme cesse d’être le fait exclusif du sculpteur ornemaniste: l’action de l’architecte devient sensible. La façade extérieure, construite entre 1515 et 1524, sera encore plus originale: un haut soubassement surmonté de deux longues séries de loges couronnées par une colonnade à la base de la toiture. Nous voyons apparaître ici pour la première fois en France les travées rythmiques imaginées par Bramante pour les embellissements du Vatican.Lorsque le royaume était en proie à la guerre civile, déchiré par les dissensions religieuses et les ambitions politiques, c’est à Blois que se jouèrent quelques-uns des actes du drame. Alors que les états généraux y siégeaient, en 1588, Henri III, inquiet de la popularité croissante du duc de Guise, le fit mettre à mort dans sa propre chambre, située au second étage de l’aile François Ier.Au XVIIe siècle, Gaston d’Orléans obtint Blois. «Monsieur» cesse de conspirer, «prend la maladie de la pierre» et conçoit un projet de reconstruction totale. Il désirait raser complètement l’ancien château afin d’élever à sa place une demeure entièrement neuve. François Mansart dessina des plans dignes d’un roi. Les travaux furent conduits activement de 1635 à 1638, puis brusquement interrompus. Le bâtiment qui occupe le fond de la cour, inachevé, permet d’imaginer le parti grandiose du dessein original: une majestueuse façade avec un avant-corps central et deux ailes en retour. De chaque côté du portique central, une colonnade formant hémicycle devait se raccorder à celles projetées pour les autres faces de la cour. L’ensemble de la composition est empreint d’une majesté inconnue jusque-là et d’un sentiment tout nouveau des proportions, qui annonce déjà le style Louis XIV. Ainsi, nous pouvons, dans la très singulière cour de Blois, «feuilleter» divers styles.
Encyclopédie Universelle. 2012.